Malgré ses paysages spectaculaires tels que le massif du Toubkal et son riche patrimoine culturel incarné par les villages berbères traditionnels, la région d’Al-Haouz continue à être la proie de dysfonctionnements structurels, notamment le manque de régulation des établissements touristiques, compromettant de la sorte son potentiel. Avec près de 70 % des structures opérant illégalement, le tourisme rural dans cette région nécessite, en retour, une intervention décisive et des actions concrètes pour être réhabilité et restructuré.
Le secteur y est gravement désorganisé, le cas des établissements illégaux à Asni et Imlil en est très représentatif. Asni et Imlil, deux villages emblématiques situés à proximité du parc national du Toubkal, attirent en effet chaque année des milliers de randonneurs et d’écotouristes. Pourtant, une grande partie des gîtes et maisons d’hôtes dans ces zones fonctionne sans licence ni conformité aux normes environnementales ou sécuritaires. Par exemple, des structures non enregistrées à Imlil accueillent des touristes sans assurance ni garantie de sécurité, exposant les visiteurs à des risques, notamment en cas d’accidents de montagne.
À titre d’illustration, les revenus générés par des circuits touristiques organisés par des guides non certifiés dans la vallée de l’Ourika échappent largement aux autorités locales. Résultat : ces revenus ne contribuent pas au financement des infrastructures locales, comme l’amélioration des routes ou des services sanitaires, aggravant ainsi les disparités sociales et les tensions entre les opérateurs officiels et informels.
Pire : Dans le Haut Atlas, la popularité croissante de certains circuits non réglementés a également engendré une dégradation des ressources naturelles, notamment l’érosion des sentiers et l’accumulation de déchets. Le lac Ifni, par exemple, un site de randonnée prisé, a été confronté à des problèmes de pollution en raison de la présence incontrôlée de campements temporaires non aménagés.
Pour y pallier, un programme similaire au modèle adopté par la région de Chefchaouen pourrait par exemple être un modèle à suivre. Là-bas, un partenariat entre le ministère du Tourisme et les autorités locales a permis de régulariser plusieurs maisons d’hôtes grâce à des incitations fiscales et un accompagnement technique. Ce type de programme pourrait être adapté à Al-Haouz en facilitant l’obtention des licences pour les opérateurs locaux et en offrant des subventions pour les mises aux normes des infrastructures.
Un exemple réussi, faut-il le reconnaître, est le centre de formation des guides touristiques d’Amizmiz, qui a permis de professionnaliser plusieurs dizaines de jeunes issus de communautés locales, leur offrant ainsi un revenu stable et améliorant l’expérience des touristes. Mais pourquoi ce modèle n’a-t-il pas encore été élargi à d’autres zones de la région, comme Tahanaout ou Ouirgane, pour combler le déficit de guides certifiés et promouvoir des activités durables, telles que les randonnées éco-responsables ?
Copier des modèles sur autrui n’est pas un gros péché pourvu qu’il versa dans la bonne cause. Par exemple, la vallée d’Aït Bouguemez, la “Vallée Heureuse”, offre un exemple inspirant. Grâce à des projets financés par des ONG internationales et des partenariats avec les collectivités locales, cette région dispose désormais de circuits balisés, de gîtes écologiques et d’une meilleure gestion des flux touristiques. Une initiative similaire dans les vallées de l’Ourika ou de l’Oukaïmeden pourrait transformer ces zones en modèles de tourisme durable tout en respectant l’environnement et les spécificités locales.
Le village de Tameslohte, réputé pour son artisanat traditionnel, illustre comment le patrimoine culturel peut être intégré dans une offre touristique. La création de marchés hebdomadaires dédiés à l’artisanat local et d’ateliers de tissage ou de poterie ouverts aux visiteurs a permis d’attirer un nouveau public tout en générant des revenus pour les communautés locales. Al-Haouz pourrait développer des initiatives similaires pour valoriser les savoir-faire locaux, tels que la production de tapis berbères ou la cuisine traditionnelle.
Le Maroc accueillera des événements sportifs internationaux qui offrent une opportunité unique pour intégrer le tourisme rural à une stratégie plus large de promotion touristique.
Des épreuves telles que le Marathon des Sables et l’Ultra Trail du Mont Blanc (UTMB), qui ont déjà lieu dans d’autres régions du Maroc, pourraient être adaptées à Al-Haouz. Cela encouragerait le développement d’une infrastructure spécifique pour le tourisme sportif, comme des campements éco-responsables ou des parcours adaptés à des compétitions de trail et de cyclisme.
Pour réussir la transformation du secteur, les experts pensent que le ministère du Tourisme devrait s’impliquer activement, en adoptant des mesures telles que mesures concrètes qu’il pourrait adopter :
-Création d’un fonds de développement pour le tourisme rural : Inspiré du Fonds de Développement Régional en France, ce mécanisme pourrait financer des projets de réhabilitation et d’infrastructures dans les zones rurales.
-Lancement d’une campagne de communication dédiée : À l’image de la campagne “Morocco, Kingdom of Light”, une initiative centrée sur le tourisme rural d’Al-Haouz pourrait mettre en avant ses spécificités uniques, comme les traditions berbères et les paysages du Haut Atlas.
-Appui à des partenariats public-privé : En encourageant les investissements dans des projets éco-touristiques, comme les lodges haut de gamme respectueux de l’environnement, à l’instar du Kasbah Tamadot, propriété de Virgin Limited Edition, déjà implantée dans la région.
Certes, la région d’Al-Haouz dispose de tous les atouts pour devenir un modèle de tourisme rural durable. Avec une vision claire et des actions bien ciblées, le tourisme rural pourrait devenir un levier clé pour le développement inclusif et durable d’Al-Haouz, tout en renforçant l’attractivité du produit…