Le programme de cette 15ème édition portant sur le thème de Science et Conscience s’intéresse particulièrement à l’héritage de l’âge d’or des sciences qu’a connu l’Islam, apportant une contribution notable au développement des sciences en Europe et dans le monde entier. Le langage porte encore l’empreinte de cette influence, l’algorithme, la chimie et l’alchimie, ou encore l’algèbre trouvant leurs racines dans la langue arabe.
Ainsi des tables rondes et des masterclass permettront de mieux connaître ce patrimoine scientifique et ces grands savants qui étaient à la fois théologiens, guides spirituels ou philosophes et scientifiques. La journée du mercredi traditionnellement consacrée à la jeunesse sera l’occasion d’échanger sur la transmission aux jeunes enfants, adolescents et étudiants notamment sur le sujet de l’éthique dans les enseignements scientifiques en partenariat avec les universités marocaines.
Seront également questionnées les relations entre les sciences et les religions aujourd’hui. D’éminents spécialistes du dialogue entre science et foi, mais aussi des représentants des différents cultes débattront ensemble sur les sciences aujourd’hui et les projets d’avenir. Et pour clore ces rencontres, un émouvant récital de chants bretons et soufis – fruit d’une collaboration avec le pèlerinage islamo-chrétien du Vieux Marché créé en 1954 en Bretagne par l’islamologue Louis Massignon autour du symbole commun des sept dormants – rendra hommage au moine rescapé de Tibhirine disparu récemment au monastère de Midelt.
L’éveil de la conscience sera au centre de l’exposition de Louise Cara, Les manteaux des Eveillés, portant un regard artistique et contemporain sur la transmission traditionnelle soufie de l’influx divin et prophétique à travers le manteau ou khirqa. Dans le prolongement de l’exposition, un atelier pour enfants ainsi que deux récitals poétiques et musicaux.
Des projections cinématographiques permettront de découvrir Shirine, un opéra contemporain écrit par le Goncourt Atiq Rahimi, inspiré d’une histoire soufie du XIIème siècle de Nizami. Shirine met en valeur une femme forte et de pouvoir, une prise de conscience pour aujourd’hui, loin des clichés sur la place des femmes dans les civilisations musulmanes. Une projection du film Al Ghazali, l’alchimiste du Bonheur sera associée à une masterclass – atelier de calligraphie arabe « lumière sur lumière » d’après le verset coranique commenté dans le Michkât al-Anwâr ou Tabernacle des lumières. Au terme de son chemin spirituel, al-Ghazâlî écrivit son œuvre maîtresse : Ihyâ ‘ulûm al-dîn, la Revivification des sciences de la Religion, un ouvrage qui ouvre la voie de l’intériorité à de nombreuses générations.
Le festival accueillera des artistes du monde entier qui explorent les traditions des musiques du soufisme tout en leur donnant une interprétation à la fois vivante et inspirée. La création d’ouverture proposera une immersion à la cour moghole, où les maestros de la musique hindoustanie de l’Inde du Nord, les interprètes de chant soufi qawwali et de la danse kathak seront réunis pour mettre en lumière un prince soufi indien du XVIIème siècle, Dârâ Shikôh et ses actions en faveur de la coexistence fructueuse des religions. La clôture rendra hommage à Rûmî et à sa conception étonnante au XIIème siècle de la physique nucléaire et notamment son célèbre poème Les atomes dansent. Le festival accueillera pour la première fois l’ensemble de musiciens et de derviches tourneurs turcs de Konya pour un grand samaa mevlevi. Et bien sûr, comme les années précédentes, le public aura plaisir à retrouver, sous les bigaradiers du jardin de Jnan Sbil, les traditionnelles réunions de samaa des confréries soufies marocaines et une soirée de clôture consacrée aux grandes voix marocaines du samaa .
Carole Latifa Ameer
Directrice artistique et de la programmation du festival