Certes, le secteur touristique marocain connaît actuellement une dynamique sans précédent, avis communément partagé et par le public et par le privé. C’est d’ailleurs ce qui en est sorti lors d’une réunion stratégique présidée par Fatim-Zahra Ammor, l’après-midi d’hier jeudi 05 décembre, un bilan détaillé a été dressé en présence de la CNT et du nouveau directeur général de l’ONMT, Achraf Fayda. Bien entendu, cette rencontre a été du pain béni pour Mme la Ministre de mettre en lumière des chiffres records, ce qui ne l’a pourtant pas empêchée de relever des défis structurels et organisationnels que le secteur devra, selon ses propos, surmonter pour maintenir cette trajectoire ascendante.
Avec 14,6 millions de visiteurs enregistrés à octobre 2024, des recettes en devises atteignant 97 milliards de dirhams, et 24 millions de nuitées, le Maroc a franchi un cap décisif dans son attractivité touristique. Ces chiffres traduisent une progression de 10% par rapport à 2023, témoignant d’un regain d’intérêt des touristes internationaux. En outre, le secteur a généré 827 000 emplois en 2023, créant 25 000 nouveaux emplois directs, renforçant son rôle stratégique dans l’économie nationale.
Ces performances exceptionnelles, fruit d’une collaboration étroite entre le gouvernement et les acteurs privés, positionnent le Maroc comme une destination de choix en Méditerranée et en Afrique. Cependant, derrière cette croissance se cachent des réalités plus complexes.
Mais derrière l’embellie, on trouve une santé fragile des entreprises touristiques, car malgré les chiffres flatteurs, de nombreuses entreprises touristiques peinent encore à se relever des séquelles de la pandémie de Covid-19. Les remboursements de crédits contractés pour maintenir leur activité grèvent leurs finances, limitant leur capacité à investir dans la mise à niveau des infrastructures ou l’amélioration de leurs services. Il serait prématuré pour le gouvernement d’imposer des pressions fiscales accrues sur un secteur encore en convalescence. Pas plus que le reproche fait aux hôteliers d’avoir diminué le salaire de leurs collaborateurs d’environ 19% sans fournir les arguments qui en crédibilisent la véracité…
Bien que des efforts aient été consentis pour améliorer la qualité des services, les initiatives telles que la nouvelle validation des étoiles hôtelières ou les visites de clients mystères restent en cours de déploiement. Les retards observés dans l’application de ces mesures reflètent une certaine lenteur institutionnelle qui pourrait freiner les ambitions du secteur.
Face aux enjeux croissants, la ministre a identifié trois priorités stratégiques pour consolider les acquis et préparer l’avenir :
1. Renforcement des infrastructures touristiques : La ministre a insisté sur la mise à niveau des infrastructures en harmonie avec l’expansion du secteur aérien. Le programme Cap Hospitality, bien que prometteur, reste sous-exploité. L’urgence de moderniser les établissements existants et d’augmenter les capacités d’accueil est cruciale pour répondre aux flux croissants.
2. Formation des Talents : Un consensus s’est dégagé autour de l’inefficacité des mesures actuelles de formation, notamment celles dispensées par l’OFPPT. Les retards dans l’ouverture des académies touristiques ont empêché de nombreux jeunes de rejoindre les bancs des écoles spécialisées pendant deux années consécutives, fragilisant ainsi le renouvellement des compétences dans un secteur en pleine expansion.
3. Promotion des nouvelles destinations : L’accent mis sur le développement de nouvelles destinations vise à diversifier l’offre touristique et à réduire la concentration sur les pôles traditionnels comme Marrakech et Agadir. Cependant, cette ambition nécessite une stratégie marketing plus fine et une meilleure coordination entre les régions.
Le Maroc se prépare à accueillir des événements majeurs d’ici 2030, dont la Coupe du Monde de Football. Ces rendez-vous constituent une opportunité unique de repositionner le Maroc sur l’échiquier mondial en tant que destination touristique de premier ordre. Toutefois, le succès de ces événements dépendra largement de la capacité du pays à relever les défis évoqués : infrastructure, formation, et qualité de service.
Si les résultats actuels témoignent d’une trajectoire positive, le secteur touristique marocain doit encore renforcer ses bases pour garantir une croissance durable. Les tensions sociales liées à la rémunération, les faiblesses dans la formation des talents, et les retards dans l’amélioration des infrastructures sont autant d’obstacles à surmonter.
Somme toute, il faudra allier audace stratégique et rigueur d’exécution, tout en maintenant un dialogue constructif avec les acteurs privés et les associations professionnelles du secteur. Comme, par exemple, la programmation par le Ministère de réunions semestrielles nationales de ce type, en l’absence des assises nationales du tourisme.
C’est tout !