12 mars 2025

Ambitions aéroportuaires et défis structurels de la stratégie 2025-2030 de l’ONDA

Sans conteste, la feuille de route ambitieuse déclinée par l’ONDA pour la période 2025-2030, est centrée sur une croissance accélérée du trafic aérien, une modernisation infrastructurelle et une préparation aux événements majeurs comme la Coupe du Monde 2030. Si les chiffres de 2024 témoignent d’une dynamique positive, elle sous-tend, cependant, des enjeux sous-jacents à cette expansion, les risques de saturation et les lacunes stratégiques à combler.

En 2024, le trafic total atteint 32,7 millions de passagers (+21 % vs 2023), tiré par le segment international (+20 %) et domestique (+30 %). Cette hausse reflète une reprise post-pandémique robuste et une attractivité renouvelée du Maroc. Toutefois, l’analyse par aéroport révèle des disparités régionales marquées :

– Rabat (+44 %, 17 M de passagers) et Tanger (+25 %, 24 M) affichent des performances remarquables, bénéficiant probablement de leur statut de hubs économiques et touristiques.

– À l’inverse, Nador (+3 %) et Casablanca (+7 %) peinent à suivre cette cadence, malgré leur importance stratégique. Casablanca, pourtant principal hub, semble déjà saturé (capacité de 14 M vs trafic de 10,5 M en 2024), ce qui interroge sur sa capacité à absorber la croissance future.

Ces écarts soulignent un déséquilibre dans l’aménagement territorial, risquant de concentrer les investissements sur des pôles déjà dynamiques au détriment de régions moins visibles.

Des défis structurels sous-estimés. L ;ONDA identifie trois défis majeurs : la forte croissance du trafic (+32 % en 2023 vs 2022), l’expansion de Royal Air Maroc (RAM) et l’organisation de la Coupe du Monde 2030. Si ces éléments sont cruciaux, leur traitement manque de profondeur :

– Saturation des infrastructures : Les données de la page 12 sont alarmantes. En 2024, Marrakech (capacité : 8 M ; trafic : 9,3 M), Agadir (2,5 M vs 3,1 M) et Tanger (2 M vs 2,4 M) sont déjà en surcapacité. Les extensions prévues (ex. : Marrakech à 16 M en 2028) dépendent de délais serrés, sans marge pour les retards fréquents dans les grands projets infrastructurels.

– Dépendance à RAM : L’objectif de RAM de passer de 50 à 200 avions d’ici 2037 suppose un doublement de la flotte en 13 ans. Or, cette croissance exponentielle nécessite des investissements colossaux en maintenance, formation et logistique, non détaillés dans le document.

– Coupe du Monde 2030 : Bien que catalyseur de trafic, cet événement ponctuel exige des infrastructures temporaires et une gestion des flux post-événementielle, absentes du plan.

Il y a aussi des ambitions floues. La stratégie repose sur :

– Infrastructures : Des extensions majeures sont prévues (ex. : nouveau terminal à Casablanca, doublement de capacités à Marrakech). Cependant, le calendrier (2025-2029) semble optimiste au vu des complexités administratives et techniques.

– Expérience passager : Le document évoque une amélioration, mais sans indicateurs concrets (ex. : temps d’attente, services digitaux).

– Transformation : La mention de « mobiliser les meilleurs talents » et de « sources de financement » reste vague. Aucun budget global n’est communiqué, et les partenariats publics-privés ne sont pas explicités.

Si l’ONDA évoque un « capital d’autofinancement » et une « ouverture à travers le monde », les modalités de financement des projets (coûts estimés, recours à l’endettement, subventions étatiques) sont occultées. Par ailleurs, la gouvernance des grands chantiers (ex. : coordination avec RAM, gestion des appels d’offres) n’est pas abordée, laissant planer un risque de bureaucratie ou de corruption.

Plus généralement, le plan est séduisant, mais à consolider tout de même…

En effet, le succès dépendra de :

– La rigueur dans l’exécution des projets infrastructurels, avec des mécanismes de suivi transparents.

– Une répartition équilibrée des investissements pour éviter la surchauffe de hubs saturés.

– Un cadre financier clair, associant acteurs publics, privés et internationaux.

– Une adaptabilité face aux aléas (retards, fluctuations du trafic).

Sans ces correctifs, le risque est de voir une croissance mal maîtrisée générer des goulots d’étranglement, entamant la crédibilité de l’ONDA et l’expérience des usagers.

Read Previous

Formidable mobilisation public-privé à la 2ème édition de la Siyaha Careers Celebration Week

Read Next

Les hôteliers du Souss tiennent leur gala

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *