mustapha amal 
On ne le répétera jamais assez : La région de Béni Mellal-Khénifra, bénie par ses plaines fertiles du Maroc aux contreforts de l’Atlas est la destination favorite dans le segment tourisme durable, un réservoir de richesses naturelles et culturelles mais encore sous-exploité. Avec ses paysages montagneux, ses sites historiques et son patrimoine vivant, la destination est incontestablement un terrain fertile pour le développement d’un tourisme durable et, qui plus est, un vecteur de croissance et d’inclusion. Heureusement, l’implication participative d’acteurs institutionnels et associatifs vient capitaliser sur ces atouts pour en valoriser le bien-fondé. Parmi lesquels le Programme Tourisme Durable Suisse-Maroc (TDSM), déjà lancé en 2020 et cofinancé par le Secrétariat d’État à l’Économie suisse (SECO) et le Ministère marocain du Tourisme, dont l’activité essentielle demeure structurante pour transformer ce potentiel en réalité économique, tout en répondant aux défis socio-environnementaux.
Et il y a de quoi. La région se distingue par une biodiversité préservée (géoparc M’Goun, classé UNESCO), un patrimoine culturel ancestral (traditions berbères, artisanat) et des atouts géographiques propices au tourisme d’aventure (randonnée, VTT, rafting). Cependant, son développement touristique reste limité par des lacunes infrastructurelles et un manque de visibilité à l’échelle nationale et internationale. Le TDSM vise précisément à catalyser ces atouts via une approche intégrée, alignée sur les objectifs de la « Vision 2020 » et la feuille de route touristique spécifique à la région, qui toutes deux promeuvent un tourisme inclusif et respectueux des écosystèmes.
Pour sa part, le Conseil Régional du Tourisme de la région Béni Mellal-Khénifra, qui bénéficie justement du Programme Tourisme Durable Suisse-Maroc, engage plusieurs actions pour promouvoir le tourisme durable.
L’un des axes majeurs de sa stratégie à ce sujet repose sur le partenariat avec Intrepid Travel, un acteur reconnu du tourisme responsable. Cette collaboration consiste à former des guides locaux, de générer des opportunités d’emploi et de proposer une offre touristique respectueuse des populations locales et des écosystèmes naturels.
Une autre initiative louable est l’organisation des « Rencontres Chasse et Pêche Durables » qui ont le mérite de sensibiliser les acteurs locaux et les visiteurs à la préservation des ressources naturelles tout en favorisant des pratiques responsables, conciliant ainsi conservation de la biodiversité et développement économique.
En mettant en place ces actions, le CRT Béni Mellal-Khénifra contribue à faire de la région une destination modèle du tourisme durable au Maroc. Son engagement en faveur d’un développement touristique équilibré, alliant valorisation du patrimoine, respect de l’environnement et inclusion économique, renforce son attractivité et son positionnement sur la scène internationale.
Il est vrai qu’avec 60 % de sa population vivant en zones montagneuses, la région souffre d’un déficit criant en routes, hébergements et services de base. Les circuits touristiques ruraux peinent à attirer des visiteurs sans infrastructures adaptées.
Ajoutez à cela, en termes de compétences et de formation, le peu de qualification des acteurs locaux qui manquent souvent de compétences en gestion durable, marketing digital ou accueil touristique, limitant de la sorte la qualité de l’offre et la compétitivité. De plus, l’implication insuffisante des populations locales dans les projets risque de générer un sentiment d’exclusion, compromettant la durabilité des initiatives.
Face à ces défis, le TDSM déploie une stratégie multidimensionnelle depuis 2020, centrée sur quatre piliers :
1. Modernisation des Infrastructures avec une approche durable
-Réhabilitation d’hébergements : 21 établissements ruraux (HTR) rénovés et 19 en cours, intégrant des normes énergétiques et environnementales.
-Aménagement de circuits : 16 itinéraires thématiques créés, dont des circuits « dinosaures » dans le Géoparc M’Goun, combinant éducation et écotourisme.
-Diversification des activités : Introduction de sports nature (équitation, VTT, rafting) pour attirer une clientèle internationale.
2. Renforcement des capacités locales
-Formations ciblées : Plus de 50 professionnels formés aux standards GSTC (Global Sustainable Tourism Council) et à la gestion durable.
-Plans d’action (PATD) : Intégration de critères de durabilité dans le Plan de Développement Régional, en collaboration avec les communes et coopératives.
3. Promotion des partenariats public-privé
-Collaborations institutionnelles : Appui technique aux prestataires locaux et création de réseaux entre acteurs touristiques.
-Implication des femmes et des jeunes : Intégration de coopératives féminines dans la chaîne de valeur (artisanat, hébergement), générant revenus et autonomie.
4. Marketing territorial et innovation: Stratégie de communication : Valorisation des atouts uniques (géoparc, villages berbères) via des plateformes digitales et des partenariats avec des tour-opérateurs spécialisés.
En cinq ans, le TDSM a impulsé une dynamique transformative à travers la création de centaines de postes directs et indirects, notamment pour les jeunes et les femmes, tout en permettant une attractivité renforcée des sentiers aménagés et les HTR rénovés qui attirent une clientèle écotouristique exigeante. En fait, il s’agit d’un modèle réplicable, vu que les PATD peuvent servir de blueprint pour d’autres régions marocaines. D’ailleurs, Mme Françoise Salamé Guex, Cheffe de coopération à l’Ambassade de Suisse, souligne : « Ces initiatives transforment l’économie locale en valorisant les ressources sans les épuiser, tout en renforçant la résilience communautaire.
Justement, l’atelier de capitalisation prévu le jeudi 27 février 2025 à Béni Mellal marquera une étape clé pour consolider ces acquis et planifier la phase suivante, avec un focus sur l’élargissement des partenariats et le financement de projets pilotes. Il servira sans doute à identifier et documenter les meilleures pratiques et innovations du programme TDSM, afin de créer un modèle de développement du tourisme durable au Maroc, applicable dans ses dimensions sociales, économiques et environnementales.
La matinée sera ponctuée par des présentations et des séances de questions/réponses animées par des représentants de la Wilaya, du Conseil Régional/SDR, de l’Ambassade de Suisse/SECO, de la SMIT, du Ministère du Tourisme, de Swisscontact et de la SDR Atlas. Les thèmes abordés incluront le mécanisme d’appui technique et financier aux HTR, la démarche de diagnostic touristique et l’appui à l’opérationnalisation de la SDR Atlas.
Grâce au TDSM, les acteurs locaux démontrent qu’il est possible de concilier préservation environnementale, rentabilité économique et équité sociale. Toutefois, la pérennité de ces avancées dépendra certainement de la poursuite des investissements dans les infrastructures, de la formation continue des professionnels et de l’ancrage d’une culture collaborative entre tous les stakeholders.
Dans une perspective mondiale où les touristes privilégient toujours plus les destinations responsables, Béni Mellal-Khénifra a l’opportunité de constituer une référence en matière de tourisme durable au Maroc, à condition de maintenir ce cap ambitieux et inclusif.
