Meknès s’est donné rendez-vous le 10 octobre 2025 pour formaliser ce que beaucoup appelaient jusque-là une simple tradition : la reconquête rationnelle et contemporaine de l’activité des calèches. Lors d’un colloque organisé par le CPT de Meknès, en partenariat avec l’Association Ismailia Al Kobra, la SOREC et l’ENCG Meknès, étudiants, chercheurs, acteurs du tourisme et représentants institutionnels ont présenté diagnostics, prototypes et mesures opérationnelles. Les interventions et les travaux présentés ce jour-là prescrivent désormais les jalons d’un plan d’action concret, appuyé par l’INDH, pour le financement et par l’Université Mohammed VI Polytechnique sur le volet design et prototypage.
La rencontre, tenue dans le calendrier qui a nourri les discussions publiques de la semaine, a rassemblé trois types d’apports complémentaires :
- Diagnostic de terrain commandité par le CPT et conduit avec la participation d’étudiants de l’ENCG : une analyse SWOT claire a mis en lumière forces (valeur patrimoniale, attractivité touristique, savoir-faire local), faiblesses (conditions sanitaires variables, formation inégale des cochers, manque d’infrastructures de repos pour les chevaux), opportunités (segmenter l’offre touristique, circuits thématiques, ateliers de médiation) et menaces (mauvaise image si aucun contrôle n’est établi, concurrence des mobilités motorisées). Les conclusions ont été présentées publiquement lors du colloque et remisent aux décideurs locaux pour gouvernance.
- Prototypes et innovation matérielle : La SOREC, en association avec l’UM6P, a dévoilé un prototype de calèche « nouvelle génération » conçu de bout en bout au Maroc pour devenir un véhicule allégé, harnais ergonomique pour limiter les contraintes biomécaniques sur l’animal, compartiments modulables pour le confort des passagers et dispositifs intégrés de médiation culturelle (supports audio et panneaux). Le prototype a été présenté comme preuve de concept et feuille de route technique pour des séries pilotes à lancer en test sur des itinéraires choisis.
- Plan de gouvernance et financement : L’INDH s’est déclarée prête à soutenir un projet pilote de restructuration (formation, subventions pour l’achat ou la rénovation de calèches, création d’un fonds d’urgence vétérinaire), tandis que le CPT a proposé la création d’un label local « Calèche responsable de Meknès »assorti d’un observatoire mixte (municipalité, vétérinaires, associations de protection animale, représentants des cochers) pour les contrôles et la délivrance des agréments.

Le colloque a confirmé une coalition d’acteurs assortie de responsabilités précises :
-Coordination / pilotage : Le Conseil préfectoral du tourisme de Meknès à travers un portage institutionnel et lien avec les opérateurs touristiques.
-Associations locales : L’Association Ismailia Al Kobra via la médiation sociale et ancrage local des initiatives patrimoniales.
-Expertise équine et prototypage : La SOREC et l ;UM6P par la conception des calèches, bonnes pratiques d’élevage et propositions techniques.
-Formation & diagnostic : L’ENCG Meknès grâce aux études, SWOT et modules pédagogiques pour la professionnalisation des cochers.
-Financement social : L’Initiative nationale pour le développement humain par des mécanismes d’accompagnement financier pour la structuration. 
Ces engagements formalisés lors du colloque montrent une volonté partagée : réguler et professionnaliser plutôt qu’interdire, en associant protection animale et création d’un produit touristique qualitatif.
Les mesures opérationnelles validées au colloque :
-Tests pilotes : lancement de deux circuits test (coucher de soleil Bab Mansour-jardins de l’Agdal ; circuit patrimoine médina, durée 45–60 min) avec calèches prototypes UM6P et suivi vétérinaire quotidien.
-Label et cahier des charges : 12 critères de labellisation et certificats vétérinaires, jours de repos obligatoires par semaine, rotation des animaux, formation certifiante des cochers, tarification affichée, contrôlés trimestriellement par l’observatoire.
-Formation certifiante : module de 120 heures (accueil client, médiation culturelle, premiers soins équins, hygiène) proposé par l’ENCG avec la SOREC comme organisme certificateur.
-Infrastructure : création de trois aires de repos équipées (ombre, abreuvoirs automatisés, maréchalerie mobile) le long des circuits prioritaires.
-Suivi-évaluation : questionnaire de satisfaction client couplé à un registre sanitaire numérique pour chaque animal (vaccinations, soins, périodes de travail) alimenté par vétérinaires partenaires.
La force du colloque du 10 octobre a permis d’aligner calendriers, financements et compétences. Concrètement, il a produit un « plan d’entrée en vigueur » : deux circuits pilotes d’ici la fin 2025, le lancement d’une formation certifiante au premier trimestre 2026 et la mise en place d’un premier audit de labellisation au second trimestre 2026. Le modèle proposé par Meknès est tel qu’il peut être réplicable, tout en restant adapté aux contraintes climatiques (périodes de forte chaleur) et urbaines de la ville.
Les intervenants ont clairement répondu aux voix qui demandent l’interdiction des calèches : la stratégie adoptée privilégie la régulation (normes sanitaires, périodes de repos, formation) et la transparence (affichage des tarifs, registre sanitaire public). Les organisateurs ont aussi prévu une campagne de communication ciblée destinée aux touristes et aux familles locales pour expliquer les nouvelles règles et valoriser le label, afin d’éviter les polémiques et d’améliorer l’acceptation sociale.
En articulant expertise technique (SOREC & UM6P), diagnostic socio-économique (ENCG), pilotage territorial (CPT) et soutien financier (INDH), Meknès inaugure une démarche pragmatique : concilier respect du vivant, valorisation patrimoniale et création d’emplois locaux. Si les engagements tenus lors du colloque se traduisent par des pilotes rigoureux et contrôles indépendants, la calèche pourra redevenir un vecteur d’attractivité respecté, un héritage vivant réinventé pour l’économie touristique du XXIᵉ siècle.
Meknès, cité aux larges avenues et aux ruelles chargées d’histoire, redécouvre donc un patrimoine vivant à travers ses calèches. Ce patrimoine devient un produit de niche structurant pour le tourisme local, un chantier d’innovation sociale et un terrain d’équilibre entre tradition et bien-être animal. À travers une stratégie concertée mobilisant acteurs publics, associations locales et centres de formation, la ville met en chantier une reconquête maîtrisée de cette filière, avec des initiatives concrètes et immédiatement visibles sur le terrain.
Oui, plutôt que de proposer de simples promenades folkloriques, les acteurs locaux positionnent les calèches comme un produit touristique thématisé et qualifié. Chaque circuit vise un public distinct pour familles, curieux d’architecture, amateurs d’histoire et s’accompagne d’un commentaire guidé susceptible d’être numérisé (audio-guides multilingues) pour enrichir l’expérience.
Concrètement, imaginer une « balade au coucher du soleil » reliant Bab Mansour aux jardins de l’Agdal, ou un « circuit immersion patrimoine », entre mémoire et modernité, centré sur les monuments almohades, permet de segmenter l’offre, d’optimiser les flux et d’éviter la congestion des zones sensibles de la médina. Ces parcours doivent s’accompagner de fiches pratiques (durée, tarif, points d’embarquement, niveaux d’accessibilité) disponibles en ligne et sur place.




