La Chambre de Commerce Britannique pour le Maroc a organisé, jeudi 19 mai 2022, un webinaire sous le thème « Souveraineté sanitaire au Maroc: Entre ambitions et défis». Retransmis en direct sur son site http://www.britcham.ma et rediffusé sur Youtube, l’évènement a connu la participation de représentants des secteurs public/privé du Maroc et du Royaume-Uni.
Lors de ce webinaire, trois intervenants ont pris la parole :
● Mme. Bouchra Meddah, Directrice des Médicaments et de la Pharmacie au ministère de la Santé et de la Protection sociale
● M. Othmane Boumaalif, Directeur Médical des Laboratoires Laprophan
● M. Jaafar Heikel, Épidémiologiste et économiste de la santé, Président du centre Analyse et Études en
épidémiologie et systèmes de santé (EPISYS)
Organisé dans un contexte où le Maroc opère un redéploiement stratégique de ses politiques sociales, ce webinaire a été l’occasion de revenir sur les nouvelles orientations du secteur de la santé du Royaume.
C’est ainsi que Mme. Bouchra Meddah a annoncé que le ministère est en cours de finalisation d’une nouvelle politique pharmaceutique: “Avec l’Organisation Mondiale de la Santé, nous nous sommes mobilisés pour l’élaboration d’une nouvelle politique pharmaceutique 2022-2026 adaptée au contexte actuel et aux enjeux du futur”. Le livrable finale de cette nouvelle stratégie, résultat d’une approche inclusive comprenant des acteurs publics et privés, sera bientôt présenté par le ministre, a annoncé Mme. Meddah.
Parmi les principales nouveautés, Mme. Meddah a indiqué la création d’un nouvel organe de régulation: “Les consultations avec les différents acteurs ont permis l’émergence d’un consensus sur un certain nombre d’actions, parmi lesquelles, la création d’une nouvelle agence nationale indépendante de régulation des médicaments et des produits de santé, de contrôle de qualité et de souveraineté sanitaire”. Cette restructuration qui, selon Mme. Meddah, s’inspire des modèles américain et britannique des agences de régulation, intervient au moment où le Maroc est candidat pour abriter le siège de la future Agence Africaine des Médicaments.
Représentant les Laboratoires Laprophan, M. Othmane Boumaalif a rappelé que “l’histoire de l’industrie pharmaceutique marocaine se confond largement avec celle de Laprophan, qui revient à 1949”. M. Boumaalif a également salué le “virage entamé par le Maroc” en mettant en œuvre la politique de généralisation de la couverture sanitaire, tout en soulignant la nécessité d’avoir une industrie pharmaceutique nationale forte qui pourra accompagner cette dynamique. Et pour ceci, M. Boumaalif a relevé que, en termes de chaînes de valeurs, le tableau est peu satisfaisant, puisque l’industrie pharmaceutique marocaine est “faiblement intégrée à l’industrie chimique et parachimique. Cette dépendance vis-à-vis des intrants et matières premières venant de l’étranger handicape la compétitivité nationale, indispensable à la réalisation d’une souveraineté sanitaire”, a-t-il indiqué. En revanche, d’après M. Boumaalif, l’industrie pharmaceutique marocaine peut d’ores et déjà “se targuer de plusieurs atouts:
– La troisième industrie pharmaceutique en Afrique en termes de taille
– Un chiffre d’affaires de 1,8 milliards de dollars annuels
– Une production nationale couvrant 80% du marché local
– Des ressources humaines techniques de 13.000 employés.
Pour sa part, M. Jaafar Heikel, a tenu à rappeler l’expérience marocaine de gestion de la pandémie qui, à ce jour, a permis de soigner 1,3 millions de patients atteints du Covid-19 par des ressources humaines marocaines. Revenant sur l’un des enjeux majeurs des ambitions marocaines en matière de souveraineté sanitaire, M. Heikel a noté que le financement du système de santé doit permettre de passer d’un taux de 50% à 60% des dépenses sanitaires à la charge du citoyen, à une marge se situant entre 10% et 20%.
Pour qu’il puisse atteindre ces objectifs, entre autres, le système de santé marocain, selon M. Heikel doit “changer de philosophie, en transformant le ministère de la santé d’un organe d’exécution des politiques sanitaires, en un régulateur et visionnaire capable de régionaliser ces actions, puisque la mobilisation des moyens de santé n’est pas la même suivant chaque contexte régional”, a indiqué M. Heikel. En outre, à l’image du secteur de l’éducation, M. Heikel recommande “d’accepter que les partenariats public-privé soient une priorité du ministère de la santé, où il est possible de trouver plusieurs synergies entre les opérateurs publics et privés, notamment dans des logiques régionales”.