Les 13 et 14 octobre 2025, Marrakech accueillera pour la première fois en Afrique un congrès entièrement dédié au bien-être et aux spas hôteliers, à l’Es Saadi Marrakech Resort. Cet Africa Wellness Congress (AWC) se tient dans un contexte où le secteur demeure encore sous-exploité sur le continent mais néanmoins en pleine mutation.
Selon le Global Wellness Institute, l’économie mondiale du bien-être a dépassé 5 600 milliards de dollars en 2024, avec une croissance annuelle proche de 8 %. L’Afrique reste encore marginale dans cette répartition mais montre des signaux forts. En 2023, la taille de l’économie du bien-être atteignait environ 23,6 milliards de dollars en Afrique du Sud, 9,1 milliards au Maroc et 7,9 milliards au Kenya. Ces montants agrègent onze sous-secteurs, allant du tourisme wellness aux spas et au fitness, et révèlent un potentiel encore loin d’être saturé.
La dynamique de reprise post-pandémie n’est cependant pas homogène. Nonobstant, le Maroc figure parmi les marchés les plus dynamiques avec près de 7 % de croissance annuelle moyenne entre 2019 et 2023, ce qui lui permet d’atteindre 131 % de son niveau pré-Covid. L’Afrique du Sud et l’Égypte avancent plus prudemment, autour de 0,4 % de croissance annuelle sur la même période, mais conservent des bases solides. Le tourisme joue un rôle moteur dans cette reprise : en 2024, le Maroc a accueilli un record de 17,4 millions de visiteurs (+12 %), le Kenya 2,08 millions (+30 %) et l’Afrique du Sud 8,38 millions (+22,4 %). Cette vitalité touristique ouvre donc un boulevard aux concepts combinant hospitalité et bien-être.
Le congrès de Marrakech s’articule autour de trois chantiers concrets, évitant les discours génériques : intégrer le bien-être dès la conception hôtelière, valoriser l’authenticité locale et optimiser la technique ainsi que les ressources humaines.
D’abord, l’intégration du spa ne peut plus être un « plus » accessoire dans un resort car il devient un axe de différenciation et de rentabilité. Les études de cas présentées à l’AWC, comme celui du Royal Mansour Marrakech (où le spa pèse plus du quart des revenus F&B), montre qu’un espace bien conçu et dimensionné dès l’origine permet d’optimiser le RevPAS (revenu par surface spa) et d’améliorer la performance globale. La tendance mondiale confirme cette direction vu que le tourisme de bien-être a déjà dépassé 830 milliards de dollars en 2023 et croît de plus de 9 % par an, avec la zone MENA en tête des progressions.
Ensuite, la mise en avant du savoir-faire local est une réponse directe aux attentes des clientèles internationales. Hammams traditionnels et rituels berbères au Maroc, ont prouvé qu’ils sont des expériences enracinées dans le territoire créent une véritable valeur ajoutée. Le Global Wellness Institute souligne que dans les économies touristiques, la part du tourisme wellness et des spas domine déjà la structure de revenus et que la différenciation par l’expérience locale augmente significativement le panier moyen sans exploser les coûts.
Enfin, le nerf de la guerre reste l’exploitation technique et humaine. Les experts estiment qu’un spa performant réduit les coûts énergétiques et hydriques (par exemple en recyclant l’eau des circuits humides et en installant des systèmes de variation de vitesse pour les pompes), de calibrer la capacité cabine en fonction de la saisonnalité et de former le personnel avec des programmes certifiants. Les resorts qui atteignent 65 à 70 % d’occupation cabine en haute saison et 45 % hors saison, tout en orchestrant un upsell ciblé (parcours hydro, soin signature, vente d’un produit adapté) voient leur panier client bondir de 18 à 25 % sans augmenter les charges fixes.
Marrakech a été choisie parce qu’elle est une destination phare du tourisme bien-être, portée par son patrimoine rituel et son offre hôtelière de luxe. Comme le souligne Caroline Bauchet-Bouhlal, propriétaire de l’Es Saadi Resort, la combinaison entre infrastructures modernes et héritage culturel (hammam, huiles essentielles, herboristerie) constitue un modèle exportable sans perdre en authenticité.
Reste à préciser que l’objectif affiché du congrès est de générer des engagements opérationnels : projets pilotes, standards communs et feuille de route concrète pour les investisseurs. Pour le Maroc, l’enjeu est évident: capitaliser sur son dynamisme touristique et sa culture du soin pour bâtir des formats « plug-and-play » duplicables dans d’autres marchés africains.
Justement, l’Afrique apparaît donc comme un portefeuille de micro-modèles, où chaque pays peut tirer parti de ses atouts naturels et culturels. A espérer tout de même que l’Africa Wellness Congress, en réunissant investisseurs, opérateurs, architectes et consultants, puisse contribuer à faire du continent un acteur à part entière dans l’économie mondiale du bien-être.




