Rabat sera la bonne «salle des machines» des infrastructures touristiques intelligentes

Tel que nous l’annoncions hier lundi 1er septembre (Rabat accueille un sommet inédit sur les infrastructures touristiques intelligentes – premiumtravelnews ), Rabat réunit, les 10–11 septembre 2025 au Four Seasons Rabat at Kasr Al Bahr, une convergence rare d’architectes, maîtres d’ouvrage, opérateurs hôteliers, logisticiens et autorités publiques autour d’un enjeu concret : rendre les infrastructures touristiques interopérables, pilotables par la donnée et prêtes pour 2030.

Les intervenants programmés durant North Africa Smart Infrastructure Summit ont le mérite de bien connaître leur affaire :

-Imad Barrakad, Directeur général de la Société marocaine d’ingénierie touristique: La SMIT est le chef d’orchestre tout indiqué pour la transformation : mobilisation industrielle et financière (objectif de plusieurs milliards d’euros d’investissements), constitution d’une Banque de Projets Tourisme et mise en place de projets locomotives destinés à diversifier l’offre (parcs thématiques, stations rurales, MICE). Son rôle au sommet consistera à aligner prospectives financement/production et imposer des standards d’interopérabilité pour les nouveaux actifs.

-François Clément, Senior Principal de Populous (Conception d’enceintes sportives et lieux d’événements à grande échelle): Populous apporte les savoir-faire « smart venue » en billetterie numérique intégrée, crowd analytics, jumeau numérique pour la maintenance et l’exploitation en temps réel. Projet emblématique : le Grand Stade de Casablanca, conçu pour basculer entre phases sportives, concerts et congrès, générateur d’un trafic touristique récurrent plutôt que d’un pic ponctuel. Au sommet, sa contribution technique vise sans doute à standardiser les exigences opérationnelles post-événement.

-Tarik Oualalou, Co-fondateur de OUALALOU+CHOI (O+C): Architecture urbaine, aménagements intermodaux et réversibilité des usages. O+C travaille sur l’intégration du patrimoine et de la mobilité douce dans les projets d’infrastructure : connecter gares LGV, gares routières et quartiers patrimoniaux sans casser la trame urbaine. Son approche rend les équipements « utilisables » toute l’année, pas seulement lors des grands événements, un impératif pour la viabilité locale.

-Moncef Belkhayat (H&S Invest Holding spécialisée en développement retail & F&B, expérience urbaine). Belkhayat représente certainement la couche « expérience quotidienne » qui transforme l’infrastructure en produit touristique consommable : retail intégré aux hubs, concepts de restauration rapides mais premium, services de proximité pensés pour le visiteur. Sa logique commercialise l’écosystème (paiement unifié, fidélité croisée hôtel-retail) et convertit les flux en revenus persistants.

-Hicham Airoud, Directeur de l’Habitat et de la Promotion Immobilière, Ministère de l’Aménagement du Territoire: Airoud pousse à l’industrialisation des normes : permis dématérialisés, BIM comme document contractuel, exigences d’efficacité énergétique et planification des données urbaines (flux piétons, îlots de chaleur). Son rôle est décisif : sans cadre normatif robuste, les démonstrateurs privés peinent à devenir standards nationaux.

-Dr. Mohamed Rdali (Deputy CEO, La Mamounia Marrakech): La Mamounia symbolise sans conteste la mutation du palace en « plateforme » à travers maintenance prédictive, segmentation ultra-fine de la demande, intégration des offres culturelles locales dans le parcours client. L’enjeu est de reproduire cette qualité perçue à l’échelle nationale pour faire monter l’ensemble de la destination en gamme.

-Mohamed & Hamza Laghrari (ALH Holding / ALH Hospitality): Focalisée sur le développement et l’exploitation hôtelière multi-villes (business & lifestyle), ALH structure un pipeline multi-villes (Casablanca, Marrakech, Rabat, Tanger) de biens pensés «nativement data-ready» comme les PMS ouverts, capteurs d’usage, automatisation housekeeping, opérations MICE optimisées, autant de briques indispensables pour convertir l’investissement en performance opérationnelle. Leur présence au sommet concerne la standardisation des interfaces techniques entre hôtellerie et plateformes urbaines.

En fait, ces intervenants sont des nodes opérationnels d’un réseau. SMIT structure l’investissement, Populous et O+C conçoivent la réversibilité des actifs, ALH, La Mamounia et H&S Invest industrialisent l’exploitation commerciale, le ministère garantit la scalabilité réglementaire. Ensemble, ils traduisent en exigences techniques les grandes ambitions (LGV, flotte RAM, aéroports plateforme, stades multifonctions), et c’est précisément ce calage entre conception, financement, exploitation et norme qui déterminera si les projets livrés deviennent des moteurs de revenu ou des coûts d’entretien.

En effet, le prolongement et l’activation du réseau grande vitesse (LGV), déjà pensé en colonne vertébrale entre Casablanca, Kénitra, Rabat et Marrakech, deviennent un outil de redistribution territoriale des touristes. À l’échelle 2030, la LGV réduit les frictions temporelles entre hubs aériens et destinations secondaires (Essaouira, Ouarzazate, stations de montagne), permettant des schémas « arrivée par avion, ensuite transport par LGV vers l’escapade régionale » qui allongent la durée moyenne de séjour et l’occupation hors-pic. Concrètement, les exigences « smart » pour la LGV incluent billettique interopérable (train+bus+city-pass), dashboards temps réel partagés avec ONCF/ONMT.

Pour rappel, le volet LGV figure déjà comme priorité opérationnelle dans les feuilles de route nationales et dans les chantiers liés à la CAN 2025 / Mondial 2030).

Quant aux nouveaux équipements (stades, halls d’exposition, centres de congrès, ports de plaisance modernisés), ceux-ci sont conçus comme plateformes flexibles plutôt que monofonctions. La logique suivie consiste à ce que tout équipement doit pouvoir basculer entre exploitation sportive, foire MICE, festival culturel et usage communautaire, grâce à :

De sa part, Royal Air Maroc a lancé une stratégie d’ampleur, matérialisée par des consultations et négociations portant sur des dizaines à centaines d’avions, pour accompagner la montée en charge attendue jusqu’à 2030 et au-delà. Selon des sources concordantes, RAM prépare des commandes importantes (combinaison Boeing et, possiblement pour la première fois à grande échelle, Airbus/A220) et projette une augmentation massive de sa capacité long et moyen-courrier dans la décennie à venir ; certaines sources rapportent des projets visant jusqu’à 200 appareils à l’horizon 2037, avec des livraisons significatives dès la seconde moitié des années 2020 pour densifier les fréquences vers l’Europe, l’Afrique et long-courrier.

Les termes exacts des commandes (nombres finaux et mix Airbus/Boeing) restent sujets à finalisation contractuelle.   

Le plan national Airports 2030 dont le montant annoncé est de 38 milliards MAD, tend , à son niveau, à doubler la capacité nationale d’ici 2030 et à faire de Casablanca Mohammed V un hub intercontinental capable d’absorber 35 millions de passagers par an via un nouveau terminal majeur (livraison visée fin 2029). Les axes concrets de sa réalisation consistent en la construction de nouveaux terminaux à Casablanca, extensions Marrakech/Agadir, modernisation des pistes et parkings, infrastructures cargo et l’automatisation des contrôles, check-in biométrique, information voyageur en temps réel intégrée au city-pass, bagages connectés et GTB terminalaire pour réduire consommation énergétique et temps d’attente.

Collectivement, ces éléments font des « aéroports de demain » des véritables centres d’orientation touristique our la fidélisation et la montée en gamme de l’offre nationale.

A souligner que le sommet est porté par un opérateur privé d’événements stratégiques, en partenariat avec ministères et agences (SMIT, ONDA, ONCF). Format : plénières de gouvernance, ateliers techniques, zone d’exposition. Avantage : capacité à lancer des pilotes rapides et à agréger financements privés. Limite : seule une gouvernance publique-publique-privée robuste transformera ces pilotes en standards imposables et en obligations contractuelles pour les prochains appels d’offres.

Rabat deviendra alors une opportunité de câbler la chaîne complète alliant conception, finance, exploitation et régulation avec des livrables concrets (MOU, pilotes, KPIs) à court terme. Les intervenants présents apportent, ensemble, l’ensemble des briques nécessaires : de la norme (ministère, SMIT) à la technique (Populous, O+C), à l’exploitation (ALH, La Mamounia, H&S) et au levier de connectivité (RAM, ONCF/ LGV).

Si, entre 2026 et 2030, chaque projet intègre par défaut interopérabilité, mesure et gouvernance data, le Maroc transformera ses investissements d’événementiel en infrastructures-produit, capables de soutenir une activité touristique dense 365 jours par an.

Read Previous

Qu’est-ce qui bloque encore à Meknès, toujours en friche ?

Read Next

Le cocktail doux-amer d’erreurs structurelles derrière le capotage du Plan Azur

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *