Le dilemme du diesel et de l’électrique dans le transport touristique: Quel choix pour le Maroc ?

Le Maroc doit accélérer la modernisation de son parc de transport urbain et touristique, en lien direct avec les événements sportifs mondiaux qu’il s’apprête à accueillir, notamment la Coupe d’Afrique des Nations (CAN) 2025 et surtout la Coupe du Monde 2030. Dans ce contexte, l’annonce récente d’un appel d’offres massif pour l’acquisition de plus de 1 750 autocars à moteur diesel, principalement d’origine chinoise, soulève des interrogations critiques sur la stratégie environnementale et économique adoptée par les autorités marocaines.

Selon les informations disponibles, le ministère de l’Intérieur prévoit d’importer entre 1 750 et 1 900 autocars diesel, au coût estimé d’environ deux millions de dirhams par véhicule, pour répondre à l’urgence des besoins logistiques liés à l’organisation des grands événements sportifs et à la saturation actuelle du parc automobile touristique. Cette commande est susceptible pallier le déficit criant d’autocars touristiques de 48 places, indispensable pour les transferts aéroportuaires, les congrès et les croisières.

Cependant, cette décision semble en contradiction avec les engagements affichés par le Maroc en matière de transition écologique et de mobilité durable. En effet, parallèlement à ce projet, le Royaume a lancé un ambitieux programme de renouvellement de sa flotte de bus urbains, avec l’objectif d’acquérir 7 000 bus d’ici 2030, dont la moitié sera électrique. Le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, a souligné que le coût des bus électriques est désormais comparable à celui des bus thermiques, rendant la transition vers des véhicules propres économiquement viable.

Le choix d’importer massivement des autocars diesel alors que le pays développe une politique volontariste pour la mobilité électrique interroge. Un bonus écologique conséquent, allant de 500 000 à 800 000 dirhams par autocar électrique, pourrait être envisagé pour encourager cette solution durable, qui aurait un impact positif majeur sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre et sur l’image internationale du Maroc en tant que pays engagé dans la lutte contre le changement climatique.

Les importateurs et transporteurs touristiques marocains sont actuellement mobilisés 7 jours sur 7 pour assurer cette commande exceptionnelle, avec un fort recours au marché chinois, reconnu pour sa capacité de production rapide. Toutefois, certains points techniques et conditions liées aux véhicules proposés restent problématiques, freinant l’adoption immédiate de ces nouveaux autocars par les opérateurs locaux.

Ce constat met en lumière un dilemme : comment concilier l’urgence d’équiper rapidement le parc automobile touristique pour répondre à la demande croissante, notamment en vue de la CAN 2025 et du Mondial 2030, avec la nécessité d’une transition énergétique cohérente et durable ? Le Maroc doit impérativement renforcer ses infrastructures de recharge, garantir la fiabilité technique des véhicules électriques, et soutenir financièrement les acteurs du secteur pour réussir cette mutation.

Le secteur du transport touristique est un pilier fondamental de la chaîne touristique marocaine, qui inclut également l’hébergement, la restauration et la location de véhicules. La Fédération Nationale du Transport Touristique Terrestre(FNTT-CGEM) souligne que le parc actuel est insuffisant, ne couvrant qu’environ 25 % des besoins, et appelle à un effort d’investissement massif pour éviter des déficits structurels menaçant la pérennité des entreprises du secteur.

L’organisation de la CAN 2025 est perçue comme un tremplin pour tester les infrastructures et les processus en vue du Mondial 2030. La Fédération Royale Marocaine de Football (FRMF) a d’ailleurs commandé une centaine d’autocars de 48 places pour cet événement, témoignant de la montée en puissance des besoins logistiques.

Dans ce contexte, miser sur des autocars diesel, alors que le Maroc affiche une ambition claire vers la mobilité verte, pourrait nuire à son image internationale et à sa crédibilité sur la scène environnementale. Le choix de véhicules électriques représenterait un signal fort, aligné avec les engagements climatiques mondiaux et les attentes des partenaires internationaux.

La commande massive d’autocars diesel, bien qu’expliquée par des contraintes d’urgence et de disponibilité, semble être une décision conservatrice et peu cohérente avec la stratégie nationale de transition énergétique. Or, pour conjuguer efficacité opérationnelle et responsabilité écologique, il est impératif d’accélérer l’adoption des autobus électriques, d’accompagner financièrement les acteurs du transport touristique, et de renforcer les infrastructures nécessaires.

Le défi est lancé : faire du transport touristique un exemple de durabilité et d’innovation, à la hauteur des ambitions royales et des attentes globales.

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