La crise de gouvernance au sein du CRT Draa-Tafilalet (https://premiumtravelnews.com/2025/02/16/le-torchon-brule-au-crt-draa-tafilalet/), qui semble marquée par des tensions internes et des dysfonctionnements structurels, révèle les enjeux cruciaux d’une gestion collégiale et transparente pour un développement touristique équitable. En prenant l’exemple d’Ouarzazate et de son arrière-pays -territoire aux atouts exceptionnels (patrimoine cinématographique, kasbahs classées à l’UNESCO, paysages présahariens)-, une refonte de la gouvernance s’impose pour concilier attractivité internationale et inclusion des acteurs locaux.
À Ouarzazate, où le tourisme se concentre autour des studios de cinéma et d’Aït Benhaddou, une gouvernance inclusive devrait intégrer les communautés rurales de l’arrière-pays (vallées du Dadès, du Drâa, oasis de Fint). Par exemple, le modèle des coopératives agricoles et artisanales de Tinghir, impliquées dans l’écotourisme, montre comment une délégation décentralisée peut renforcer la légitimité des décisions.
Les manquements relevés -absence de comptes rendus, budgets opaques- sapent la confiance. Une solution réside dans la digitalisation des processus. Le CRT pourrait s’inspirer de la plateforme «E-Tourisme Maroc», lancée par l’ONMT en 2023, pour publier en temps réel les procès-verbaux, rapports financiers et évaluations d’impact. Par ailleurs, l’adoption d’outils de blockchain pour tracer les financements alloués aux projets (comme la rénovation des ksour ou le développement d’écolodges) garantirait une gestion auditée et participative.
Les échecs aux foires de Madrid ou Berlin pointent un décalage entre l’image projetée et les réalités locales. Une promotion efficace doit valoriser les spécificités territoriales via des récits authentiques. Par exemple, le partenariat récent entre l’ONMT et Netflix pour promouvoir les décors d’Ouarzazate (Atlas Studios) illustre une synergie gagnante entre industrie cinématographique et tourisme. De même, la mise en avant des routes des oasis (labellisées « Réserve de biosphère » par l’UNESCO en 2020) via des documentaires interactifs ou des circuits immersifs (en collaboration avec des influenceurs locaux comme Hakima Fareh, ambassadrice du tourisme solidaire) renforcerait l’attractivité tout en incluant les artisans et guides locaux.
L’absence de concertation critiquée au CRT appelle à des mécanismes de consultation permanents. Le modèle des Assises régionales du tourisme, organisées en 2023 à Zagora avec des ateliers thématiques (tourisme culturel, agroécologie), pourrait être agrandie et institutionnalisé, pourquoi pas ?. Par ailleurs, l’implication des startups marocaines comme GoMada, spécialisée dans le tourisme expérientiel, permettrait de co-construire des offres adaptées (randonnées connectées dans l’Anti-Atlas, réservations en ligne d’hébergements chez l’habitant).
Au-delà des clichés, le développement équitable exige de dépasser les logiques de centralisation. À Tamnougalt, village près d’Ouarzazate, un projet pilote de tourisme patrimonial participatif -financé par la Banque Mondiale et géré par une association locale- redistribue 30 % des recettes aux habitants pour restaurer les kasbahs. Ce modèle, répliqué dans l’arrière-pays, éviterait une exploitation asymétrique des ressources. De même, l’essor de l’énergie solaire (centrale NOOR) pourrait alimenter des infrastructures touristiques low-carbon, positionnant la région comme destination pionnière en tourisme vert.
Comme quoi, la crise du CRT Draa-Tafilalet est une opportunité de réinventer une gouvernance touristique ancrée dans l’équité procédurale, l’innovation et le dialogue territorial. Pour Ouarzazate et son arrière-pays, cela implique, à notre sens, de consolider avant tout les instances collégiales en y intégrant les représentants des communes rurales au Bureau Exécutif, digitaliser la gouvernance (plateformes open data, audits indépendants) et cocréer une marque territoriale inclusive, mêlant patrimoine, cinéma et savoir-faire locaux.
Seule donc une approche holistique, associant transparence, légitimité et vision partagée, permettra à la région de devenir un modèle de tourisme équitable, loin des « clichés vides » dénoncés par les professionnels. Le succès dépendra de la capacité à transformer les tensions actuelles en leviers de cohésion, d’innovation et d’aller vers l’avant…