L’impact stratégique de l’événementiel et l’animation urbaine
À l’heure où le tourisme mondial se redéfinit sous le double impératif de durabilité et d’innovation, le choix de Taghazout, au Maroc, pour accueillir le Congrès National des Entreprises du Voyage 2025, s’inscrit dans une logique à la fois stratégique et inspirante. Cette station balnéaire à l’ascension fulgurante, encore méconnue de la majorité des professionnels français du secteur, constitue un nouveau cap dans la manière dont la profession envisage ses ambitions pour la destination: plus responsable, plus ouverte, et résolument tournée vers la co-construction internationale. À travers cette interview, Valérie Boned, présidente des EDV, nous décrypte les motivations profondes de ce choix, souligne la dynamique de coopération croissante entre les acteurs français et marocains du tourisme, et trace les contours d’un partenariat ambitieux, porté par une vision commune du développement territorial et d’un tourisme de qualité. À travers ses propos, se dessine une feuille de route claire : conjuguer attractivité, innovation et exemplarité dans un monde en mutation.
Pourquoi avoir choisi Taghazout, au Maroc, pour accueillir le Congrès National des Entreprises du Voyage 2025 ?
Le choix du Maroc s’est imposé naturellement, porté par l’énergie proactive de l’ONMT qui a su nous proposer une collaboration fructueuse. Le pays conjugue accueil chaleureux et professionnalisme exemplaire, des atouts essentiels pour un événement de cette envergure. Quant à Taghazout, ce site allie avec élégance tradition et dynamisme, offrant des infrastructures hôtelières de qualité capables de répondre à nos exigences. Sa proximité avec Paris, à seulement 3h30 de vol direct, répond à notre volonté de limiter la durée du trajet pour les congressistes. Enfin, moins de 10 % des participants connaissent cette destination, ce qui constitue un avantage précieux : celui de faire découvrir un joyau encore méconnu, à l’image de la relation entre la France et le Maroc.
Quels éléments spécifiques à cette destination ont motivé ce choix, notamment en termes d’image et de stratégie touristique ?
Taghazout est une destination en pleine émergence, prisée mondialement par les surfeurs, mais qui recèle un potentiel touristique encore largement sous-exploité. Son climat idéal, la puissance de sa nature environnante et son authenticité préservée en font une pépite rare. Cette destination offre une image renouvelée et prometteuse, capable de séduire un public en quête d’expériences uniques et durables.

Le congrès EDV 2025 se tient en partenariat avec l’Office National Marocain du Tourisme. Comment évaluez-vous la coopération actuelle entre les acteurs français et marocains du tourisme, et quels axes d’amélioration identifiez-vous pour fluidifier la communication et la collaboration ?
L’ONMT fait preuve d’une remarquable dynamique, traduisant sa volonté par des actions concrètes et efficaces, ce qui est très appréciable. Notre coopération mutuelle amplifie nos ambitions respectives : le Maroc se prépare à deux événements majeurs dans les cinq prochaines années, tandis que la France recherche une offre touristique enrichie, diversifiée et accessible. Le Maroc répond parfaitement à ces attentes, et notre collaboration doit encore se structurer pour optimiser la synergie entre nos acteurs.
La présence officielle de Royal Air Maroc et Transavia en tant que transporteurs du congrès traduit une volonté d’ancrage stratégique. Comment ces compagnies contribuent-elles selon vous à la connectivité et à la compétitivité du marché franco-marocain ?
La connectivité aérienne est un pilier fondamental pour un tourisme durable et performant. Royal Air Maroc, avec sa stratégie ambitieuse à l’approche de la Coupe du Monde de football, et Transavia, qui développe des fréquences accrues vers des destinations en plein essor, renforcent la compétitivité du corridor franco-marocain. Le congrès sera une occasion privilégiée pour ces compagnies d’exposer leurs stratégies et de consolider leur rôle clé dans le développement du marché.
Vous avez sans doute une volonté d’exemplarité en termes de durabilité dans le choix des destinations pour le congrès, avec un format alternant entre des lieux domestiques et plus lointains. Comment cette stratégie s’inscrit-elle dans la politique globale de responsabilité environnementale des EDV ?
Depuis ma prise de fonction à la présidence, il y a près de deux ans, j’ai inscrit la durabilité non pas comme un simple volet isolé, mais comme une véritable culture à déployer progressivement et avec constance. Le choix des destinations, dont Taghazout est la deuxième étape, illustre cette politique globale. Mon premier congrès en tant que présidente, en juin 2024, s’est tenu en France, à Val d’Isère, accessible en train et en été, un choix fort et symbolique. Cette année, nous privilégions une destination proche, accessible en moins de quatre heures de vol direct, alternant ainsi entre national et international tout en respectant des critères rigoureux.
Comment percevez-vous l’évolution des relations touristiques entre la France et le Maroc, et quels sont selon vous les leviers à renforcer pour dynamiser davantage ce partenariat ?
Je crois fermement en un partenariat qui dépasse les déclarations d’intention. Il est impératif de formaliser cette volonté par une feuille de route claire, assortie d’un plan d’action précis et d’étapes identifiées. C’est exactement ce que nous nous apprêtons à mettre en œuvre, afin de structurer et dynamiser durablement cette coopération.
Le Maroc, à travers Taghazout, symbolise la montée en gamme et le développement durable. Comment les acteurs français du voyage perçoivent-ils cette évolution, et quelles opportunités cela représente-t-il pour les agences et tour-opérateurs français ?
Cette évolution représente une opportunité tangible de répondre à une demande croissante, notamment de la part d’une clientèle jeune et exigeante, en quête d’authenticité et de tourisme responsable. Pour les agences et tour-opérateurs français, c’est une chance majeure d’élargir leur offre vers une destination qui allie qualité, innovation et respect des valeurs environnementales.
Entretenez-vous des relations directes et régulières avec les fédérations marocaines du tourisme ? Si oui, autour de quels axes de coopération stratégique ces échanges s’articulent-ils ?
Nous sommes en phase de formalisation d’un partenariat avec ces fédérations, afin de renforcer nos échanges et bâtir ensemble des projets communs. Tout reste à construire, et cette collaboration sera essentielle pour avancer efficacement sur des axes stratégiques partagés.
En matière d’investissements touristiques de la France vers le Maroc, quelles sont selon vous les tendances prioritaires : une montée en puissance du modèle « club all inclusive », ou une valorisation accrue de l’hôtellerie à l’architecture et au charme marocains traditionnels ?
Il est crucial de proposer une offre diversifiée qui réponde à la pluralité des attentes des clients. Le marché réclame à la fois des solutions adaptées aux familles, telles que les clubs all inclusive, et une valorisation forte de l’hôtellerie traditionnelle, avec son architecture et son charme authentique. Cette complémentarité est la clé d’un développement harmonieux et durable.
Comment les Entreprises du Voyage pourraient-elles contribuer à une diversification de l’offre touristique marocaine, au-delà des pôles classiques que sont Marrakech et Agadir ?
En incitant les professionnels à découvrir et à promouvoir des destinations émergentes encore peu commercialisées, comme Taghazout. Organiser le congrès dans cette région s’inscrit précisément dans cette démarche d’ouverture et de diversification, en faisant rayonner des territoires à fort potentiel.
Le congrès met l’accent sur des thématiques importantes comme la digitalisation, la durabilité, la personnalisation de l’offre et les nouveaux comportements des consommateurs. Pouvez-vous détailler comment les entreprises du voyage françaises se préparent à ces défis, et quel rôle joue l’EDV dans cet accompagnement ?
Notre mission est d’anticiper les enjeux du secteur en amont, puis d’accompagner les professionnels dans leur transformation. Cela passe par la mobilisation de financements, la mise en place de formations adaptées, l’accès à l’expertise et le développement de partenariats sectoriels et intersectoriels.
Quelles sont vos ambitions pour renforcer la montée en compétences des professionnels du voyage face aux transformations rapides du secteur, notamment avec l’intelligence artificielle et les évolutions juridiques ?
Savoir s’entourer est primordial. Notre récente adhésion à la CPME constitue un soutien précieux pour les TPE et PME. Par ailleurs, notre engagement actif au sein d’organisations européennes et de la Confédération des Acteurs du Tourisme nous permet de porter la voix du secteur auprès des pouvoirs publics et d’accompagner efficacement les professionnels dans ces mutations.
Disposez-vous d’estimations ou de projections concernant l’évolution du tourisme vers le Maroc à l’horizon 2026 ou 2030 ?
Nous ne disposons pas encore de projections précises à court terme, mais ce sujet reste une priorité pour nos futures analyses.
Les grands événements sportifs à venir, ainsi que les projets d’infrastructures modernes au Maroc, dessinent une nouvelle dynamique économique, culturelle et touristique. Cette transformation est-elle suffisamment perçue et intégrée par les acteurs français du secteur, notamment parmi les membres d’EDV ?
Sans doute pas encore pleinement. Ce congrès sera une occasion idéale pour mettre en lumière ces enjeux, sensibiliser les professionnels français et les engager comme acteurs à part entière des actions et des résultats à venir.
Sur quels segments de l’offre touristique le Maroc se distingue-t-il particulièrement aux yeux des voyagistes français ? Et inversement, sur quels points le pays présente-t-il encore des marges d’amélioration ?
Le Maroc possède un potentiel complet et déjà exploité dans de nombreux domaines. Il convient toutefois d’intensifier la mise en valeur de la nature et du patrimoine, en combinant ces atouts pour favoriser des séjours longs et variés. J’ai rencontré à Taghazout de nombreux jeunes cadres internationaux qui combinent surf, télétravail et découverte, sillonnant ainsi la diversité des paysages marocains sur plusieurs semaines.
Enfin, dans un contexte international marqué par la guerre en Ukraine et une hausse généralisée des budgets militaires en Europe, en Amérique, en Chine et en Russie, quel regard portez-vous sur les impacts potentiels de ces tensions géopolitiques sur l’industrie touristique ?
La géopolitique, et plus particulièrement le climat actuel, retient toute l’attention des professionnels. Elle influence les choix des voyageurs, mais les études et les tendances de réservation montrent que ces derniers aspirent davantage à s’évader, à se faire plaisir et à résister à l’adversité. Le voyage demeure une réponse essentielle à ces défis.