15 juin 2025

Nouveau arrêté sur le classement des établissements d’hébergement touristique, parlons-en !

La publication très récente et patiemment attendue depuis quelques années dans le Bulletin Officiel de l’arrêté conjoint n° 985-24 du n° 7407 bis du 27 mai 2025 (néanmoins déjà prêt depuis 2023), est l’aboutissement d’innombrables actions menées, notamment par la FNIH depuis plus de 10 ans et les administrations intervenantes en hôtellerie. C’est, enfin acté ! Cet arrêté fixe avec une grande précision les normes de classement des établissements d’hébergement touristique au Maroc. Ce texte réglementaire, en fait fruit d’une collaboration entre le ministère de l’Intérieur et le ministère du Tourisme, constitue incontestablement une avancée majeure dans la structuration et la professionnalisation du secteur touristique marocain. Encore faut-il s’interroger sur le délai court de 24 mois accordé aux établissements d’hébergement touristiques de se conformer méritoirement à leur nombre d’étoiles… Bien sûr, sur plus de 4725 hôtels classés jusqu’ici, nombreux ceux qui remplissent tous les critères et qui peuvent dorénavant demander, après auto-évaluation aboutie, à être « classés » selon la nouvelle loi. Beaucoup d’autres aussi peuvent se rattraper pour remplir tous les critères exigés dans les délais. Reste cependant la question du financement à l’instar du coup de pouce énorme donné par le Gouvernement dans le cadre de Go Siyaha et Cap Hospitality. Pourquoi pas un Cap Hospitality bis ?

Justement, l’arrêté distingue clairement deux catégories de normes : D’une part, les normes obligatoires (signalées par “A”), auxquelles l’établissement doit se conformer à 100% et, d’autre part, les normes complémentaires (signalées par “B”), dont l’établissement doit satisfaire au moins 70% du total des points attribués.

Cette double approche permet d’assurer un socle minimal de qualité tout en encourageant une amélioration continue et différenciée selon les capacités et ambitions des établissements.

Le texte réglementaire détaille avec une précision remarquable les exigences tant sur le plan matériel que sur celui des services. Par exemple, pour les hôtels de catégorie luxe, les normes couvrent :

-La réservation, qui doit être possible par téléphone 24h/24 et 7j/7, avec un temps d’attente limité à cinq sonneries, un personnel multilingue et une communication claire sur les types d’unités, tarifs, politiques d’annulation et de confirmation. La réservation en ligne doit être accessible en moins de 5 clics, avec paiement en ligne possible et confirmation sous 24 heures.

-L’enseigne extérieure, qui doit être visible, en bon état, éclairée la nuit, et l’entrée équipée d’un portique de sécurité et d’un système de vidéosurveillance.

-Le parking, obligatoire pour les établissements de plus de 30 unités, doit être sécurisé, éclairé, sous vidéosurveillance, avec un service voiturier professionnel.

-Les espaces verts, l’état de propreté et d’entretien des façades, sols, murs, vitres, tapis, etc., sont également normés rigoureusement.

-L’accueil du client, qui doit être effectué dès la porte du véhicule par un personnel identifiable, en uniforme, multilingue, avec prise en charge immédiate des bagages et une bagagerie sécurisée et aménagée.

Cette réglementation, en remplaçant l’arrêté de 2003, intègre les évolutions technologiques et les attentes contemporaines des clients, notamment en matière de digitalisation (réservation en ligne, paiement électronique), de sécurité (vidéosurveillance, portique de sécurité), et de qualité de service (multilinguisme, uniformes, badges). Elle vise à aligner le secteur marocain sur les standards internationaux les plus exigeants, renforçant ainsi la compétitivité du tourisme national.

Pour les exploitants d’établissements touristiques, l’arrêté impose une révision complète des pratiques, infrastructures et services. La conformité aux normes obligatoires est impérative, sous peine de sanctions ou de non-classement officiel, ce qui impacte directement la visibilité et la crédibilité commerciale.

Pour les clients, ces normes garantissent un niveau de qualité homogène et transparent, facilitant le choix et renforçant la confiance dans les établissements labellisés.

Pour les autorités publiques, ce cadre normatif facilite le contrôle, la régulation et la promotion du secteur, en assurant une meilleure traçabilité et standardisation.

On ne peut donc être plus clair. L’arrêté conjoint n° 985-24 de décembre 2024 est un texte fondamental qui structure de manière très précise et innovante le classement des établissements d’hébergement touristique au Maroc. Par une articulation fine entre normes obligatoires et complémentaires, et une attention particulière portée à la fois à l’équipement et à la qualité des services, il pose les bases d’une montée en gamme du secteur touristique national. Cette démarche, à la fois rigoureuse et pragmatique, ouvre la voie à une meilleure compétitivité internationale et à une expérience client renforcée, tout en offrant un cadre clair et opérationnel aux professionnels du secteur.

Cependant, cette réglementation reste centrée sur les modèles classiques d’hébergement et ne semble pas intégrer explicitement certains concepts innovants émergents dans le secteur touristique mondial. En effet, parmi les concepts d’hébergement innovants non couverts par la réglementation actuelle, on note :

1. Hébergement collaboratif et économie de partage : Les plateformes de type Airbnb, location de chambres chez l’habitant, ou autres formes d’hébergement collaboratif ne sont pas spécifiquement régulées ni classées dans cet arrêté. Ces modèles, qui reposent sur des particuliers proposant des logements temporaires, échappent souvent aux normes classiques d’équipement et de service définies pour les hôtels ou résidences touristiques.

2. Éco-lodges et hébergements durables à faible impact environnemental : Bien que la réglementation mentionne des normes d’entretien des espaces verts et de propreté, elle ne prévoit pas de critères spécifiques pour les hébergements intégrant des pratiques écologiques innovantes, telles que l’utilisation d’énergies renouvelables, la gestion durable de l’eau, ou la construction en matériaux biosourcés. Ces hébergements, qui répondent à une demande croissante de tourisme responsable, ne bénéficient pas d’un cadre normatif dédié.

3. Hébergement expérientiel et thématique : Les concepts d’hébergement axés sur l’expérience immersive (par exemple, hôtels-boutiques à thème, hébergements culturels ou artistiques, ou encore logements proposant des activités intégrées) ne sont pas spécifiquement pris en compte dans les normes actuelles, qui restent centrées sur des critères fonctionnels et de service standardisés.

4. Hébergement mobile ou temporaire innovant : Les formes d’hébergement telles que les tiny houses, les yourtes modernes, les bulles transparentes, ou encore les hébergements flottants ne sont pas explicitement mentionnées ni normées dans l’arrêté. Or, ces concepts connaissent un développement rapide et nécessitent des critères adaptés en termes de sécurité, confort, et intégration environnementale.

5. Intégration avancée des technologies numériques et d’automatisation : Si la réglementation impose des normes pour la réservation en ligne et la communication multilingue, elle ne couvre pas encore les innovations telles que les systèmes d’accueil automatisés (check-in/out sans contact), la domotique intégrée, ou les services personnalisés via intelligence artificielle, qui révolutionnent l’expérience client dans certains établissements modernes.

Ce qui porte à dire que la réglementation marocaine récente sur le classement des établissements d’hébergement touristique est exhaustive pour les formes classiques d’hébergement, mais elle ne couvre pas encore plusieurs concepts innovants qui transforment aujourd’hui le secteur touristique mondial. Pour les experts, afin de rester compétitif et attractif, le cadre normatif devra évoluer afin d’intégrer ces nouvelles formes d’hébergement, notamment collaboratives, durables, expérientielles, mobiles et technologiques, offrant ainsi une meilleure reconnaissance et un encadrement adapté à ces modèles émergents.

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