Alors que le Maroc ne cesse de cumuler efforts sur efforts dans la montée en gamme de son offre hôtelière, une incongruité réglementaire persiste malheureusement toujours à Tanger : les spas y restent fermés tous les lundis, une mesure héritée depuis l’alerte gouvernementale sur le stress hydrique. Ce qui semblait à l’origine une mesure transitoire de prévention est devenu une règle figée et immuable, uniquement appliquée à Tanger, sans justification sanitaire logique ou économique actuelle, et en total décalage avec la stratégie nationale de relance du tourisme.
Depuis la levée progressive des restrictions liées à la pandémie, toutes les grandes destinations du Royaume -Casablanca, Marrakech, Fez, Agadir, Rabat, etc- ont vu leurs spas reprendre une activité normale, ouverte sept jours sur sept. Tanger, à l’inverse, reste enfermée dans une logique d’exception. Aucun texte de loi actuel, aucune directive officielle nationale n’impose pourtant cette fermeture hebdomadaire. Cette décision semble reposer sur une inertie administrative locale qui n’a jamais été remise en question, malgré son impact manifeste sur l’attractivité touristique de la ville.
Tanger, pourtant en pleine mutation touristique, économique et urbaine, voit son secteur hôtelier haut de gamme souffrir de cette restriction inexplicable. De nombreux établissements, notamment ceux alignés sur les standards internationaux, intègrent des spas dans leur offre de services au même titre que les spa indépendants. Pour un touriste en séjour court ou pour un voyageur d’affaires en déplacement de deux jours, l’indisponibilité d’un spa en début de semaine sur un jour entier désorganise l’expérience client et nuit à la promesse de confort et de bien-être pour l’entame d’une semaine en forme.
Cette contrainte va à l’encontre des efforts faits par les hôteliers pour se hisser au niveau des attentes internationales. Elle compromet également la fidélisation d’une clientèle exigeante, habituée à une accessibilité totale aux services de bien-être, notamment dans le cadre de courts séjours en semaine -ce qui est typique du tourisme d’affaires.
Tanger, grâce à la zone franche de Tanger Med, au port, et à ses liens croissants avec les capitales européennes, est assurément un pôle du tourisme d’affaires. Mais ce segment, nécessaire pour les chaînes hôtelières internationales, repose sur une offre complète de services haut de gamme, incluant notamment les spas, souvent prisés en fin de journée ou pour relâcher la pression après des rendez-vous professionnels.
En maintenant cette interdiction arbitraire le lundi -souvent jour d’arrivée ou de transition pour de nombreux professionnels- Tanger sape ses propres efforts pour se positionner en destination de congrès, de séminaires et de rencontres internationales. À l’échelle d’un secteur où la qualité de service est un critère de choix décisif, ce type de lacune opérationnelle devient un facteur d’exclusion.
L’ONMT, à travers sa stratégie « Maroc, Terre de Lumière », mise sur une diversification des produits touristiques et une montée en gamme continue. Le bien-être et le tourisme thermal font d’ailleurs partie des axes mis en avant. Dès lors, comment expliquer qu’un pan entier de l’offre tangéroise soit entravé par une décision non justifiée ?
L’absence d’harmonisation réglementaire crée là et de facto une dissonance entre les discours de relance et la réalité du terrain. À l’heure où la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima affiche de grandes ambitions -notamment avec les projets autour de la baie de Tanger, les investissements immobiliers et le positionnement croissant comme porte d’entrée de l’Afrique- maintenir une mesure aussi marginale revient à freiner volontairement l’élan économique local.
La question n’est pas uniquement administrative : elle est profondément stratégique. Le ministère du Tourisme, les autorités locales, les professionnels de l’hôtellerie et les opérateurs économiques doivent s’emparer de cette problématique, car elle illustre un écart préoccupant entre les politiques nationales et leur déclinaison locale.
Dans une logique de gouvernance moderne et de compétitivité territoriale, l’abrogation de cette règle devient urgente. Elle ne nécessite ni budgets colossaux, ni grands chantiers, mais simplement une décision pragmatique, en cohérence avec les objectifs affichés de développement.
Le maintien de la fermeture des spas à Tanger chaque lundi devient ici une aberration réglementaire qui nuit directement à l’image, à l’attractivité et à la performance économique de la ville. Dans un contexte où chaque détail compte pour séduire des clientèles exigeantes, cette mesure devient un symbole criant du besoin d’aligner les décisions locales sur la dynamique nationale. Il est temps pour Tanger de sortir de cette exception injustifiée et de rejoindre pleinement la marche du Maroc vers un tourisme de qualité, résilient, et compétitif.




