L’impact stratégique de l’événementiel et l’animation urbaine
Il semble que la RAM est déterminée à mener, tambour battant, sa dynamique d’expansion offensive et ciblée à bon port. En effet, le compagnie nationale vient, en effet, d’annoncer, à travers un communiqué de presse diffusé hier 30 juin, le lancement de 4 nouvelles lignes directes au départ de Casablanca à partir de septembre 2025, vers Munich, Zurich, Ndjamena et l’Île de Sal.
Le choix des quatre destinations traduit une logique différenciée par région : d’une part, deux capitales économiques européennes affirmées -Munich et Zurich- où la présence d’une diaspora marocaine qualifiée et stable offre un double grenier de rentabilité (VFR -Visiting Friends and Relatives- et tourisme de découverte) ; d’autre part, deux destinations africaines à potentiel croissant -Ndjamena (Tchad) et l’Île de Sal (Cap-Vert)-, qui témoignent d’un intérêt stratégique renforcé pour le continent, au cœur des ambitions panafricaines de RAM.
Avec Munich et Zurich, RAM vise sûrement à capter une clientèle à fort pouvoir d’achat, intéressée par les courts séjours, les circuits culturels ou balnéaires au Maroc, tout en renforçant la desserte des communautés marocaines établies en Bavière et en Suisse alémanique. Ces marchés offrent également un potentiel cargo non négligeable, notamment dans les secteurs pharmaceutique, automobile et de la logistique fine.
Quant à Ndjamena, elle marque un pas de plus dans l’intégration régionale aérienne du continent. Cette ligne vient répondre à un besoin réel de connectivité entre l’Afrique centrale et l’Afrique du Nord, jusque-là relativement faiblement desservi par les compagnies du continent. Elle ouvre des perspectives pour les échanges commerciaux, les flux d’affaires et les missions de coopération technique, dans un contexte où le Maroc renforce ses partenariats économiques et diplomatiques avec le Tchad.
Enfin, la liaison avec l’Île de Sal, très prisée pour ses atouts balnéaires, conforte la RAM sur le marché du multi-destinations en Afrique de l’Ouest. Elle pourrait séduire une clientèle européenne en quête de combinés “Cap-Vert-Maroc”, tout en permettant de créer des passerelles avec les diasporas capverdiennes du Benelux et de la France, souvent en transit vers leur archipel.

Cette offensive s’accompagne d’une montée en gamme déclarée de l’expérience passager, en cohérence avec l’ambition de RAM de se positionner parmi les compagnies africaines les plus fiables et confortables. Le PDG Hamid Addou souligne d’ailleurs dans ledit communiqué l’effort entrepris sur la modernisation des services embarqués, la ponctualité des vols et l’optimisation des horaires de correspondance, notamment vers les hubs secondaires européens et africains.
Le vol Casablanca-Zurich, par exemple, programmé en matinée, permet des connexions fluides vers d’autres villes suisses et allemandes via le réseau ferroviaire, tandis que le Casablanca-Ndjamena assure une continuité de flux vers les capitales d’Afrique de l’Ouest avec un temps d’escale réduit. Cette approche, à mi-chemin entre rationalisation opérationnelle et souci d’ergonomie, constitue incontestablement une réponse aux standards des voyageurs d’affaires, sans négliger le segment touristique.
Avec cette annonce, Royal Air Maroc poursuit la mise en œuvre d’un modèle de hub multi-rayonnement, plaçant Casablanca en tant que carrefour stratégique Sud-Nord et Sud-Sud, capable de concurrencer d’autres plateformes régionales (notamment Dakar, Addis-Abeba ou Istanbul). Cette ambition est d’autant plus crédible que RAM bénéficie de la stabilité institutionnelle du Maroc, d’une politique proactive de soutien public au transport aérien et d’un positionnement géographique favorable aux grands flux transcontinentaux.
Par ailleurs, la compagnie bénéficie d’un avantage comparatif sur certaines liaisons où les grandes compagnies internationales sont absentes ou peu compétitives, comme c’est le cas pour la liaison Casablanca-Ndjamena ou Casablanca-Île de Sal. Cela lui permet de renforcer son rôle de compagnie passerelle entre l’Europe, l’Afrique et l’Amérique du Nord, en lien avec les programmes gouvernementaux de promotion touristique (Go Tourisme) et d’amélioration de la connectivité aérienne.
Si la stratégie de RAM paraît cohérente et bien articulée, lui collent néanmoins plusieurs défis à surmonter pour garantir sa réussite à moyen terme. L’enjeu de la rentabilité des lignes africaines, souvent affectées par des coûts opérationnels élevés (redevances, carburant, taxes), reste problématique. Il en est de même pour la qualité de service au sol dans certaines escales africaines, encore inégale. Le maintien de l’engagement politique en faveur du secteur aérien marocain, notamment dans l’amélioration des infrastructures aéroportuaires secondaires et la libéralisation des droits de trafic, sera aussi déterminant.